Le décret d’application de l’article 29 de la loi énergie-climat – loi n°2019-1147 du 8 novembre 2019 – publié le 27 mai 2021, complète les dispositions relatives aux informations ESG fournies par les acteurs de marchés financiers, et en particulier en matière climatique et de biodiversité. Ainsi l’analyse de risque et la mesure d’empreinte biodiversité vont s’imposer aux investisseurs et donc aux entreprises dès 2022.

Les objectifs de ce décret :

  • Marquer l’ambition de la France pour une finance durable
  • Répondre aux exigences de la loi énergie-climat, avec un accent mis sur la publication des risques liés au changement climatique et à l’érosion de la biodiversité ;
  • Tirer les leçons de plus de cinq années d’expérience française en matière de reporting extra-financier, notamment avec une structuration claire de l’information publiée autour des piliers de la Task Force on Climate-Related Financial Disclosures (TCFD) sur la stratégie, la gouvernance, la gestion des risques et le recours à des métriques et cibles précises.

Quelles nouveautés pour le rapport ESG ? 

Première avancée : la création effective d’une obligation de reporting sur la biodiversité dès 2022. Le reporting biodiversité exige un alignement avec les objectifs des accords internationaux de la Conférence sur la Diversité Biologique et une analyse de la contribution de leurs portefeuilles à la réduction des principales pressions et impacts sur la biodiversité. Cette analyse peut se faire avec l’appui d’un indicateur d’empreinte biodiversité, permettant de mesurer l’alignement avec les objectifs internationaux de biodiversité. 

Le reporting climatique doit présenter des engagements alignés avec les objectifs prévus par l’Accord de Paris, et alignés avec la Stratégie Nationale Bas carbone pour les investissements réalisés sur le sol français. Un objectif quantitatif prospectif doit être inscrit, de même qu’un indicateur de résultat. Les objectifs doivent être revus tous les 5 ans, la méthodologie de révision explicitée.

Les critères ESG doivent être inclus dans la gestion des risques des portefeuilles, et notamment les risques physiques, de transition et de responsabilité liés au changement climatique et à la biodiversité. Ces risques doivent être caractérisés – actuels ou émergents, exogènes ou endogènes à l’entités, leurs occurrence, intensité et l’horizon de temps qui les caractérise – ; mais aussi doivent être segmentés. L’article distingue 

  • Les risques physiques, définis comme l’exposition aux conséquences physiques des facteurs environnementaux, tels que le changement climatique ou la perte de biodiversité ;
  • Les risques de transition, définis comme l’exposition aux évolutions induites par la transition écologique, 
  • Les risques de contentieux ou de responsabilité liés aux facteurs environnementaux

Ces risques doivent faire l’objet d’une estimation quantitative de leur impact financier pouvant s’appuyer sur des indicateurs tels que le risque de crédit, risque de liquidité, diminution de la valeur des entreprises en portefeuille. 

Cette évaluation des risques doit justifier d’une méthodologie, des données utilisées, et concernant les risques liés au changement climatique, de scénarios de prospection. Concernant les risques liés à l’érosion de la biodiversité, il faut distinguer les risques émanant des impacts causés par la stratégie d’investissement, et les risques émanant des dépendances à la biodiversité des actifs et activités dans lesquels l’entité a investi

Les implications concrètes pour la prise en compte de la biodiversité par les entreprises 

Le reporting biodiversité doit être aligné avec les objectifs des accords internationaux de la Conférence sur la Diversité Biologique qui a lieu en septembre prochain. 

Aussi, pour déterminer un objectif d’alignement, les investisseurs vont devoir évaluer les risques des entreprises et ainsi distinguer clairement deux types de risques :  ceux émanant des impacts sur la biodiversité, créés par leurs investissements, et ceux qui pèsent sur les entreprises très dépendantes de la biodiversité dans lesquelles ils investissent. 

Il existe à date plusieurs travaux de recherche sur les méthodologies et les outils d’empreinte biodiversité des entreprises et portefeuille financiers, répondant à divers objectifs. Les travaux en cours de la Task Force on Nature-related Financial Disclosures (TNFD) devraient permettre d’affiner une approche méthodologique pour les investisseurs. 

Ainsi, les entreprises vont devoir répondre aux critères ESG de leurs investisseurs. L’évaluation des impacts et des dépendances à la biodiversité des entreprises, et l’enjeu de réaliser une démarche biodiversité avec des objectifs alignés avec les accords internationaux de la Conférence sur la Diversité Biologique vont devenir un point de passage obligé. Les entreprises qui auront engagé une stratégie biodiversité structurée avec une évaluation de leur empreinte biodiversité et la définition d’objectifs robustes (par exemple avec Science-Based Targets for Nature) bénéficieront d’une très grande longueur d’avance !