Le secteur agricole dans la transition bas carbone

1) Les terres agricoles jouent un rôle important dans le cycle du carbone en France. La France métropolitaine est composée d’environ 29 millions d’hectares de terres agricoles soit environ 54% de la surface totale du pays. Bien que le secteur de l’agriculture représente aujourd’hui environ 19% des émissions sur le territoire français, les cultures, prairies et forêts permettent aussi de séquestrer une grande part de ces émissions (12%). Ce stock se partage entre les sols forestiers qui représentent 38% des stocks de carbone et les prairies permanentes 22%. Les grandes cultures et les prairies temporaires représentent, elles, 26,5%.[1]

2) Le changement d’usage des sols via leur artificialisation provoque, des effets négatifs tel que la diminution du stock total de carbone absorbé.  Des politiques publiques favorisant le maintien des prairies permanentes, des zones humides et des forêts en stoppant l’artificialisation des sols sont donc indispensables et doivent être complémentaires de celles visant l’augmentation de la séquestration carbone et l’atténuation des émissions à la source.

3) La majorité des émissions de gaz à effet de serre de l’agriculture sont indirectes et issues des procédés agricoles eux-mêmes, contrairement aux autres secteurs dont les émissions proviennent de la combustion d’énergie fossile, : le protoxyde d’azote (N2O) provient de l’usage d’engrais azotés et de synthèse et le méthane (CH4) est essentiellement produit par le processus de digestion des animaux d’élevage. Une faible partie des émissions de gaz à effet de serre provient tout de même de la consommation d’énergie des engins agricoles, des procédés de transformation et de conservation des produits et du chauffage des bâtiments d’élevage ou de maraichage.

Les émissions dans le secteur de l’agriculture ont baissé de 0,3% par an entre 2010 et 2019. Ce résultat n’est alors pas en phase avec l’objectif de la Stratégie Nationale Bas-Carbone qui prévoit une baisse de 0,8 % par an, au moins jusqu’en 2028.

BL Evolution propose aujourd’hui une boite à outils permettant à une collectivité d’intégrer les enjeux climat, air et énergie dans les actions menées auprès du secteur de l’agriculture.

Celle-ci est évidemment à adapter à chaque territoire et à son contexte mais ouvre des pistes d’actions pour les territoires et collectivités qui souhaiteraient construire une politique agricole locale à la hauteur des enjeux du XXIe siècle.

  • Action 1 : Transcrire les engagements climat-air-énergie dans la politique de développement agricole du territoire
  • Action 2 : Connaître et s’approprier la vulnérabilité du territoire au changement climatique
  • Action 3 : Construire et accompagner la souveraineté alimentaire de son territoire
  • Action 4 : Animer la transition écologique de la filière agricole de son territoire
  • Action 5 : Favoriser la séquestration carbone par un changement de pratiques agricoles
  • Action 6 : Améliorer la performance environnementale de la production agricole
  • Action 7 : Développer les énergies renouvelables avec les acteurs agricoles

Les questions agricoles sont au cœur des enjeux écologiques.

Quelle que soit la typologie du territoire, les pratiques agricoles du territoire sont des leviers d’action indispensables pour mettre en œuvre la réduction des impacts sur le climat du territoire, et son adaptation aux dérèglements climatiques présents et futurs. Ces nouveaux enjeux demandent à toutes les filières d’intégrer de nouvelles problématiques.

Les règles et pratiques agricoles d’aujourd’hui sont nées au milieu du XXe siècle, où la préoccupation était avant tout de mettre en commun l’ambition des Etats européens (et de « nourrir l’Europe exsangue de l’après guerre »). Cette politique a permis de relever les défis de l’autosuffisance alimentaire à l’échelle du continent. Elle a contribué à développer une offre alimentaire de qualité et de devenir une composante essentielle de notre patrimoine culturel et paysager et de notre économie. Au fil des réformes, l’agriculture française s’est adaptée au contexte de plus en plus ouvert des échanges agricoles en faisant le choix de maintenir un modèle d’exploitations familiales présent sur l’ensemble des territoires, y compris les plus défavorisés.

A l’échelle de l’Europe, les exploitations françaises ont donc des atouts considérables dans la lutte contre le changement climatique. Cependant, l’agriculture est un secteur dont le changement de trajectoire est lent, car directement lié à la sécurité alimentaire.

Pourtant malgré les efforts de réformes, les villes ont continué par inertie leur expansion consommatrice d’énergie, destructrice de terres agricoles et de valeurs environnementales au détriment de centre-bourgs de plus en plus abandonnés.

Or, le critère qu’il convient de placer à la même place que l’autonomie alimentaire est le risque systémique de changement climatique et son cortège de conséquences.

Ainsi, la collectivité doit impérativement partager le diagnostic avec toutes les parties prenantes de la filière, et co-construire des nouvelles orientations : la mobilisation doit être générale, et tout le monde est appelé à changer.

Il faudra du courage pour renoncer à des pratiques agricoles devenues clairement incompatibles avec notre avenir climatique. C’est sans doute le plus difficile car cela demande d’interroger directement nos modes de vie et accepter que les choix d’hier ne sont plus adaptés aux enjeux d’aujourd’hui.

Les pratiques agricoles doivent servir les enjeux sociétaux et sociaux pour toutes et tous, pour une résilience à long terme. Chaque territoire est unique par son contexte et ses problématiques posées, il doit donc pouvoir se construire un avenir par une agriculture adaptée à ces enjeux.

Cette activité complexe, à l’interface de nombreux domaines, oblige à penser de façon globale et intégrée, notamment en termes de politiques et mesures :

  • Protéger la biodiversité et les milieux en évaluant les impacts de l’agriculture sur l’ensemble des enjeux environnementaux,
  • Favoriser la résilience de l’agriculture face aux aléas climatiques en intégrant aux réflexions l’ensemble des multifonctionnalités de l’agriculture (dimensions productives, sociales et environnementales),
  • Diminuer les émissions de gaz à effet de serre des systèmes alimentaires dans leur ensemble.
  • Favoriser un stockage massif du carbone dans les sols cultivés, les prairies et les espaces naturels.
  • Répondre aux enjeux de l’emploi via des pratiques plus intenses en emplois plutôt qu’en intrant ou en dégradation des écosystèmes.

[1] Etude INRA : Stocker du carbone dans les sols français – Juillet 2019 – Réalisé par l’ADEME et le ministère de l’agriculture et de l’alimentation