BL évolution a publié une étude approfondie sur les premiers rapports de durabilité conformes à la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), publiés par des entreprises du SBF 120. Cette directive européenne impose un cadre de transparence renforcé sur les performances ESG (Environnement, Social, Gouvernance). Parmi les 85 entreprises que nous avons analysées, un grand nombre est issu du secteur du bâtiment, de l’immobilier et de la construction. Cet article se concentre sur les Impacts, Risques et Opportunités (IROs) les plus fréquemment identifiés par ces entreprises.

Un secteur aux multiples enjeux de durabilité

Les entreprises du secteur sont celles qui identifient le plus d’IROs matériels : 76 en moyenne. Ce nombre est largement supérieur à la moyenne tous secteurs confondus, de 47 IROs matériels.

Le BTP est aussi l’un des secteurs affichant le plus de thèmes ESRS matériels avec une moyenne de 9 sur les 10 thèmes. Les entreprises du secteur sont plutôt alignées car elles identifient toutes un grand nombre d’ESRS matériels : la fourchette est de 8 à 10 thèmes matériels.

Comme dans tous les rapports de durabilité analysés, les ESRS E1 (changement climatique), S1 (salariés de l’entreprise) et G1 (gouvernance) sont systématiquement matériels pour les entreprises du BTP. Parmi les autres thématiques fréquemment identifiées comme étant pertinentes par les entreprises du secteur, nous trouvons : E4 (biodiversité), E5 (économie circulaire), S2 (salariés de la chaîne de valeur), S3 (communautés affectées) et S4 (utilisateurs finaux).

Un secteur dépendant des ressources naturelles et à fort impact environnemental

Le BTP représente environ 29 % (selon Carbone 4, données 2024) des émissions de gaz à effet de serre au niveau national. C’est le deuxième poste le plus important d’émissions en France. Une part importante des émissions du secteur provient de la production des matériaux de construction (acier, béton, etc.). Ces matériaux font l’objet de risques importants en matière de disponibilité physique (raréfaction des ressources, dépendance aux matières importées, risques d’approvisionnement), et d’impact environnemental (épuisement des ressources en eau, atteinte à la biodiversité, …).

Par ailleurs, les émissions sont également liées à l’utilisation des bâtiments et des infrastructures construites.

L’analyse des risques, opportunités et impacts environnementaux montre que le BTP est à la fois un secteur directement affecté dans ses activités et sur sa chaîne de valeur par le changement climatique, et un acteur clé de la transition écologique, capable de transformer ses contraintes en leviers d’innovation, de compétitivité et de résilience.

Par exemple, les bâtiments et infrastructures sont particulièrement vulnérables aux conséquences du changement climatique et nécessitent d’être adaptés. Parmi les risques identifiés on trouve notamment :

  • Les évènements météorologiques extrêmes qui peuvent provoquer des interruptions ou perte d’activité et qui posent des questions fondamentales quant à l’adaptation des bâtiments et infrastructures aux aléas climatiques ;
  • Les nouvelles réglementations et normes environnementales qui peuvent entraîner des sanctions et poursuites en cas de non-respect, notamment sur la gestion des déchets ;
  • La hausse des coûts et les ruptures d’approvisionnement (énergie et matières premières) ;
  • La tarification carbone et le coût de mise en place de solutions permettant de réduire l’impact environnemental des chantiers.

Les risques sont majoritairement physiques, réglementaires et financiers et sont liés à de nouvelles réglementations ou à l’adaptation de l’activité des entreprises au changement climatique.

 

Concernant les opportunités en lien avec l’environnement, on retrouve le développement de nouvelles offres en lien avec la demande des consommateurs ainsi que de construire à proximité de solutions de mobilité durable (transports en commun, aménagements cyclables…). L’avantage principal de ces opportunités est de réduire le nombre de logements vacants (ce qui permet d’augmenter la rentabilité des projets) :

  • Le développement d’offres plus vertueuses et innovantes : décarbonation (matériaux, énergies, etc.), matériaux alternatifs issus de l’économie circulaire (réutilisés, recyclés, etc.), renaturation, végétalisation et régénération des écosystèmes, réhabilitation et rénovation ;
  • Des approches d’aménagements des territoires afin de promouvoir la décarbonation des mobilités et la résilience au changement climatique, et de permettre une hausse du taux d’occupation ;
  • Création de valeur et réduction des consommations de ressources et d’espace.

 

Les entreprises du BTP identifient également plusieurs impacts qu’elles ont sur l’environnement :

  • Leurs émissions de GES et la réduction des capacités d’absorption carbone (travaux, matériaux utilisés, énergie consommée, systèmes énergétiques installés, déplacements longue distance engendrés) ;
  • L’épuisement et la pression sur les ressources naturelles (sable, granulat, eau, …) et sur les écosystèmes ;
  • La production des déchets sur les chantiers et les sites ;
  • L’ensemble des pollutions (eau, air, sols, …) ;
  • La dégradation de la biodiversité et l’artificialisation des sols (imperméabilisation, fragmentation des espaces).

Le secteur du BTP a donc des impacts importants sur l’environnement et la biodiversité. Les entreprises de ce secteur en sont conscientes : 78 % ont formalisé un plan de transition climat. Presque la moitié d’entre elles (44 %) ont présenté un plan de transition biodiversité, ce qui est plus que la moyenne totale des entreprises des secteurs du SBF 120 (environ un quart d’entre elles). En effet, l’enjeu biodiversité est perçu comme un enjeu central, notamment en lien avec le ZAN, la végétalisation et la dépendance aux services écosystémiques.

Prendre en compte la totalité du cycle de vie du construit, repenser les méthodes de construction et s’orienter vers des matériaux moins énergivores et émetteurs de CO2 est indispensable pour mieux gérer ses IROs environnementaux pour une entreprise du BTP.

 

Les enjeux sociaux sont majeurs pour les entreprises du BTP

Pour 78 % des entreprises du BTP étudiées, la totalité des ESRS sociaux sont matériels. Cela démontre la multitude d’impacts, risques et opportunités liés au social dans ce secteur.

 

Par exemple, des risques importants existent sur les ressources humaines des entreprises et notamment sur :

  • La santé et la sécurité des travailleurs, en interne et sur la chaîne de valeur ;
  • La formation et le besoin d’adéquation des compétences ;
  • La difficulté de recrutement et la diminution de rétention des employés.

 

Les principales opportunités identifiées en lien avec les enjeux sociaux sont :

  • L’accès au logement et contribution à un meilleur cadre de vie ;
  • Le développement local ;
  • L’amélioration de la performance grâce à la satisfaction et l’engagement des collaborateurs.

Ces opportunités permettent de fournir aux entreprises un avantage concurrentiel ainsi qu’une meilleure réputation.

Les entreprises du secteur rapportent également qu’elles ont plusieurs impacts, notamment sur :

  • Les enjeux de santé et sécurité des travailleurs ;
  • Les conditions de travail des salariés, principalement dans les pays à risque avec des potentielles atteintes aux droits humains fondamentaux (travail des enfants ou travail forcé) ;
  • La diversité ;
  • L’impact des projets sur les communautés locales.

Le secteur du BTP a un fort enjeu de santé sécurité, étant l’un des secteurs avec le plus d’accidents professionnels (chaque année, un salarié du BTP sur 18 est victime d’un accident du travail, selon Ameli). Les entreprises du secteur ont également de nombreux autres IROs sociaux liés à leur chaîne de valeur. En effet, les risques et les impacts en lien avec les conditions de travail, l’égalité de traitement, le travail forcé et le travail des enfants ressortent comme majeurs, étant donné les pays de provenance des matières premières et transformées.

Une gouvernance responsable, le moyen de créer des relations partenariales solides

De nombreux acteurs sont impliqués sur les chantiers des entreprises du BTP, créant des chaînes de valeur longues et complexes. Établir une relation de confiance avec ses partenaires et fournisseurs est central pour opérer une transition et mieux connaître les pratiques des acteurs avec lesquels le secteur collabore, afin de prévenir les risques et limiter les impacts.

Concernant les thématiques de gouvernance, il existe un risque important lié à la corruption. Ce risque est notamment dû à la multitude d’acteurs sur les projets, les zones géographiques d’intervention, majoritairement internationales, et la difficulté de mettre en place des contrôles systématiques. Un autre risque identifié est la perte ou l’indisponibilité de partenaires commerciaux.

Ces risques peuvent entraîner notamment des sanctions en cas de fraudes, corruption, de manque de protection des lanceurs d’alerte ou de non-respect de la concurrence ainsi que des difficultés opérationnelles.

La principale opportunité identifiée par les entreprises du BTP, en lien avec la gouvernance, est la possibilité de créer de nouveaux partenariats et de renforcer ceux existants.

Les entreprises du secteur identifient ensuite un certain nombre d’impacts en lien notamment avec :

  • L’implication directe ou indirecte dans des incidents de corruption ou de pratiques non éthiques ;
  • Les achats (ir)responsables et les atteintes aux droits des travailleurs vulnérables, surtout dans la chaîne de valeur.

Les premiers rapports de durabilité publiés par les entreprises du BTP du SBF 120 offrent donc une cartographie claire des enjeux ESG spécifiques à ce secteur. Étant donné la complexité et la taille de la chaîne de valeur des projets du secteur, les entreprises doivent se saisir du sujet du devoir de vigilance et mettre en place des stratégies efficaces afin de protéger les travailleurs en interne et en externe.

Grâce à l’exercice de reporting de la CSRD, les entreprises du BTP ont pu identifier leurs nombreux IROs environnementaux, sociaux et de gouvernance et structurer leurs engagements. Le secteur s’engage vers des pratiques plus durables. D’ailleurs, toutes les entreprises du secteur du BTP étudiées ont établi des critères RSE pour la rémunération variable de leurs dirigeants. Cela démontre une volonté d’intégrer la direction dans la gestion stratégique de ces enjeux.

La mise en conformité avec la CSRD semble agir comme un catalyseur, poussant les entreprises du BTP à structurer leurs engagements, à repenser leurs chaînes de valeur et à renforcer leur résilience face aux transformations économiques, écologiques et sociales en cours.

BL évolution accompagne les entreprises du secteur du BTP afin de construire ensemble un avenir plus durable. Contactez-nous !