Mesurer l’empreinte biodiversité d’un portefeuille d’investissement est devenu un enjeu stratégique incontournable pour les acteurs financiers. Elle traduit des données en un – ou plusieurs – indicateur(s) permettant de rendre compte des effets des activités d’une organisation sur la nature, sur l’ensemble ou sur une partie de sa chaîne de valeur.

[À noter : les méthodes d’empreinte biodiversité ne permettent pas actuellement de couvrir tous les types d’investissements (ex : dérivés, devises, …) Cet article se concentre uniquement sur les investissements de type actions, obligations d’entreprises et capital-investissement.]

Les entreprises financées d’un portefeuille d’investissement, de par leurs activités, sont inextricablement liées à la nature. Elles exercent des pressions sur la biodiversité (pollution, destruction d’habitats, surexploitation, etc.) et dépendent de nombreux services écosystémiques (régulation du cycle de l’eau et du climat, pollinisation, etc.). Pour évaluer la participation aux facteurs d’érosion des entreprises financées et donc du portefeuille, il apparaît important de réaliser une empreinte biodiversité.

Une telle analyse permet d’identifier les entreprises du portefeuille les plus exposées aux enjeux biodiversité et de prioriser les thématiques à adresser. C’est ainsi une porte d’entrée vers une lecture stratégique plus fine : elle pose les premiers jalons d’une stratégie nature mature et pertinente. Dans le même temps, elle permet de répondre aux exigences réglementaires et aux demandes croissantes des parties prenantes vers une meilleure prise en compte des enjeux nature.

 

Tout au long de cet article, nous distinguerons deux types d’empreinte biodiversité : l’empreinte qualitative et l’empreinte quantitative.

 

l’empreinte qualitative

L’empreinte qualitative d’un portefeuille d’investissement permet d’obtenir une première estimation de ses impacts sur la nature. Elle offre la possibilité d’avoir une vision des enjeux de chacune des participations de son portefeuille, ou à l’échelle de ce dernier.

L’outil le plus utilisé lors de la réalisation de ce type d’empreinte qualitative est l’outil ENCORE. Développé par des institutions internationales reconnues (Natural Capital Finance Alliance, United Nations Environmental Programme), il permet d’afficher les niveaux de matérialité sectoriels d’impacts (de « Très Faible » à « Très Fort ») de 271 sous-industries. Il convient alors de reconstituer la chaîne de valeur de chaque entreprise financée puis d’évaluer chaque activité de cette chaîne, pour ne pas invisibiliser les enjeux biodiversité compris dans les activités amonts et aval. Il est alors possible d’obtenir des scores d’impacts pour chaque sous-activité, par entreprise financée, et à l’échelle du portefeuille. Une phase d’ajustement de certains scores est primordiale, pour se détacher de la vision «moyenne sectorielle » de l’outil et refléter la réalité opérationnelle de chaque entreprise composant le portefeuille évalué.

Un des atouts majeurs de l’approche qualitative réside dans sa capacité à évaluer les pressions exercées sur l’ensemble des cinq facteurs de pressions majeurs sur la biodiversité selon l’IPBES. Une exhaustivité qui n’est aujourd’hui pas réalisable par les méthodologies d’empreinte quantitative agrégée.

Cette approche permet de prioriser les enjeux au sein de son portefeuille (entreprises financées qui semblent les plus impactantes, pressions qui semblent être les plus exercées dans le portefeuille, …). Néanmoins, elle ne permet pas d’objectiver de manière robuste et sur un même indicateur quantitatif la priorisation des participations et des pressions exercées. Par ailleurs, elle ne donne pas la possibilité de suivre dans le temps des actions d’atténuation des pressions exercées et des risques liés aux dépendances envers la nature.

Il n’en reste pas moins que cette approche peut s’avérer être une étape extrêmement précieuse pour poser les premiers jalons de sa stratégie biodiversité, en offrant une meilleure compréhension des liens entre les activités des entreprises du portefeuille et la nature.

Visualisation de résultats d’une empreinte biodiversité qualitative d’un portefeuille (pressions)

L’empreinte quantitative

 

L’empreinte quantitative agrégée

L’approche quantitative de la mesure d’empreinte peut prendre la forme d’une empreinte “agrégée” ou “désagrégée”. Une empreinte biodiversité dite agrégée représente un résultat consolidé en une seule unité (MSA.km2, PDF/yr,…). Une empreinte dite désagrégée comportera un résultat sous la forme d’un tableau de bord d’indicateurs nature différents (m3 d’eau, emprise au sol, émissions de GES…). Les outils d’empreinte quantitative peuvent revêtir la forme de boussoles stratégiques pour construire et suivre sa démarche nature.

 

Une empreinte agrégée, de par son résultat de sortie en une seule et unique métrique agrégée, permet de facilement hiérarchiser les enjeux nature à l’échelle de son portefeuille et de chaque entreprise financée. Elle permet de savoir quelles pressions sur la biodiversité sont les plus impactantes. Elle offre également une comparaison des postes d’impacts entre eux : par exemple, quel pourcentage de l’impact amont de l’entreprise financée « A » provient des activités de culture du coton, quel pourcentage de l’impact en opérations directes de cette même entreprise provient des activités industrielles de production de pneu… Cela facilite également la communication sur l’impact nature : il est plus simple de communiquer sur un seul indicateur que sur une panoplie de métriques différentes et parfois complexes.

Néanmoins, ce type d’approche ne permet actuellement qu’une couverture partielle des pressions et des impacts. Trois pressions majeures sur la biodiversité sur cinq sont couvertes : changement climatique, utilisation des sols, pollution (espèces exotiques envahissantes et surexploitation des ressources non couvertes). Deux royaumes sur trois sont couverts : milieux terrestres et milieux d’eau douce (milieux marins sont non couverts pour le moment).

Chez BL évolution, il nous semble primordial de prendre en compte l’ensemble des pressions sur la biodiversité dans le cadre de la mesure d’empreinte nature de son portefeuille. C’est pourquoi nous couplons au maximum nos mesures d’empreinte quantitatives agrégées avec des mesures d’empreinte qualitatives. Par ailleurs, les analyses et le calcul n’étant pas complètement standardisés, les comparaisons précises des portefeuilles ou des entreprises financées peuvent parfois s’avérer complexes.

 

Parmi les outils existants, on distingue notamment le Global Biodiversity Score, le Corporate Biodiversity Footprint, ou encore l’outil Darwin.

 

Visualisation des différentes échelles de résultats potentielles d’une empreinte : 

Visualisation des pressions majeures exercées par les activités financées à l’échelle du portefeuille :

L’empreinte quantitative désagrégée

Une empreinte désagrégée permet d’obtenir une diférents indicateurs spécifiques, pour chaque enjeu biodiversité majeur. Elle offre donc des résultats facilement compréhensibles en interne, car plus opérationnels et proches de la réalité des métiers des entreprises financées que des indicateurs agrégés. Une empreinte désagrégée facilite l’opérationnalisation d’une démarche nature avec l’obtention d’indicateurs sur la base desquels des actions de réduction peuvent être définies et suivies dans le temps.

 

Néanmoins, il peut s’avérer complexe de comparer précisément deux postes d’impacts sur la base d’une empreinte désagrégée, les métriques d’impacts n’étant pas toujours identiques entre chaque poste d’impact. Une priorisation des enjeux peut ainsi s’avérer parfois plus complexe que pour une empreinte quantitative agrégée, mais oblige à comprendre les tenants et aboutissants des imptacts.

 

 

Visualisation d’indicateurs pouvant constituer une empreinte désagrégée (non-exhaustif) :

Faire de l’empreinte biodiversité un levier stratégique

Chaque méthodologie de mesure d’empreinte biodiversité d’un portefeuille, qu’elle soit quantitative ou qualitative, comporte de nombreux atouts et quelques faiblesses. En fonction des secteurs des participations de son portefeuille et de ses besoins, le choix des approches et outils retenus s’avère essentiel pour s’assurer que les résultats des mesures d’empreinte réalisées soient actionnables et pertinents. Ils permettent alors de poser les premiers jalons d’une démarche nature mature à l’échelle du portefeuille et de chaque participation. La réalisation d’une empreinte de son portefeuille apparaît comme une étape incontournable d’une prise en compte mature de ses enjeux biodiversité, et le nombre d’acteurs financiers ayant réalisé une telle démarche ne cesse d’augmenter. Chez BL évolution, nos experts et expertes vous accompagnent dans le choix et la réalisation de vos mesures d’empreinte, n’hésitez pas à nous contacter dès maintenant pour en savoir plus !