C’est l’angle d’attaque légèrement tapageur parfois choisi par certains médias pour parler des voies réservées au covoiturage. Au-delà des angoisses autosolistes, retour sur un outil relativement nouveau qui se développe de plus en plus en dehors des réseaux autoroutiers. Peut-il s’étendre au-delà de ces territoires très denses et devenir un outil à part entière de la stratégie de mobilité des intercommunalités?  

VR2+ : De quoi parle-t-on ?

Selon le CEREMA, les “VR2+” sont des voies réservées aux véhicules de transport en commun, mais également, selon les cas, aux taxis, aux véhicules transportant deux occupants ou plus et aux véhicules à très faible émission. Ces voies se situent le plus souvent sur les pénétrantes des agglomérations, régulièrement congestionnées en heure de pointe. 

L’objectif ? Offrir un avantage comparatif aux modes autorisés à y circuler par rapport à la circulation générale. Au-delà, les voies réservées offrent également un levier pour améliorer la qualité de l’air et diminuer le taux d’émission de gaz à effet de serre par personne transportée. 

Des expérimentations qui ouvrent le champ des possibles pour les agglomérations de taille intermédiaire

Les grandes villes n’ont pas le monopole des bouchons : une simple recherche sur Google Trafic montre que les villes moyennes connaissent aussi leur lot de ralentissements en heure de pointe, engendrant temps perdu, nuisances sonores ou baisse de la qualité de l’air. 

Si les voies réservées ont historiquement vu le jour sur les réseaux autoroutiers ou nationaux, plusieurs expérimentations sont aujourd’hui menées sur les réseaux départementaux et locaux. Ainsi, à l’initiative du Conseil départemental de la Haute Savoie et du Grand Annecy, la RD 508 accueille depuis janvier 2023 une voie réservée “VR2+” sur la RD 3508. Il s’agit d’une expérimentation de 4 ans en partenariat avec l’Etat, incluant notamment un dispositif de contrôle automatique. Autre exemple à Nantes, où le boulevard de la Prairie-de-Mauves accueille une VR2+ depuis juin 2023. Bien qu’il s’agisse d’une grande métropole, l’utilisation d’un boulevard urbain traditionnellement congestionné aux heures de pointe ouvre une perspective pour des agglomérations moins importantes. 

Des prérequis indispensables pour une voie réservée fonctionnelle et acceptée

Une infrastructure dimensionnée pour accueillir une voie réservée

Principalement des axes à 2×2 ou 2×1 voies, en pénétrante, connaissant des problématiques de congestion. La longueur de la voie réservée doit être suffisamment importante pour éviter de reporter le phénomène de congestion en début ou fin de linéaire. 

Une offre alternative à l’autosolisme crédible

La question de l’acceptabilité sociale d’une telle démarche est évidemment décisive dans ses chances de succès. Une voie réservée sera d’autant mieux acceptée que les conditions de son utilisation la rendent accessible au plus grand nombre. Il est donc indispensable de proposer un écosystème alternatif à la voiture individuelle crédible et attractif : par exemple, la structuration d’un système covoiturage complet (aménagement d’aires en amont, en aval et sur l’axe concerné, système de mise en relation efficace, forte communication et campagnes incitatives) ou la mise en place d’un transport collectif à haut niveau de service cadencé. L’intermodalité doit également être fortement structurée en amont et en aval de l’itinéraire pour faciliter les correspondances vers les pôles d’emplois et de services excentrés.

Des modalités de contrôles effectives

Les voies réservées installées sur les axes M6 et M7 de la Métropole de Lyon étaient, en 2021, peu respectées en raison du manque de contrôles. En 2023, le déploiement progressif de radar sur les axes concernés devrait augmenter sensiblement le respect de  leur modalités d’utilisation. 

Un outil qui doit s’inscrire dans une réflexion plus globale sur la place de la voiture et l’organisation du territoire

La voie réservée est un outil puissant pour inciter à sortir du “tout-autosolisme”. Pour autant, elle représente un effort important en termes d’études techniques, de budget, de communication, d’accompagnement au changement… Ce levier doit donc être envisagé parmi un panel plus large de solutions, comme le travail sur les horaires d’embauche et d’entrées en classe, pour diminuer la congestion en heures de pointe, le développement d’une dynamique interne aux employeurs pour favoriser la pratique du covoiturage, la sécurisation des trajets à vélo dans un rayon de 10 km autour des pôles d’emploi, la relocation des emplois et services au cœur des communes, pour limiter les flux “navetteurs” vers des bassins d’emplois uniques, etc. 

Si le sujet vous intéresse, n’hésitez pas à entrer en contact avec nos experts. Ils sont là pour vous aider à identifier les opportunités dans votre territoire ainsi que pour vous accompagner dans la construction d’une stratégie de mobilité durable adaptée et réussie.